jeudi 28 juillet 2016

Atelier d'écriture du 27/06/2016 - 18h15

Animé par : Carole



Deux thèmes au choix :

« Étant donné un mur, que se passe-t-il derrière ? »

« Les maillots qui grattent »
***


Au pied du mur en pierre entourant le domaine jouxtant mon modeste jardin, se trouve un petit arbre faiblard sur les branches duquel poussent deux ou trois feuilles maladives. Je le regarde parfois, juché sur un seau retourné, par-dessus le mur en caillasse grise. Il me fait de la peine. Personne ne vient l'arroser, le soigner, le dégager des ronces qui l'enserrent. Pourtant, la maison du propriétaire est presque entièrement dissimulée par d'immenses chênes aux troncs massifs et vigoureux.

Pourquoi cet arbre, à part des autres, souffre-t-il autant, pourquoi ne pousse-t-il pas et ne ressemble-t-il pas à ses congénères avec lesquels il partage pourtant la même terre. De temps à autre, n'écoutant que ma compassion, je tente de l'arroser. Par-dessus le mur, je lui lance un peu de compost pour le fortifier. Mais il ne grandit pas, comme s'il dédaignait toute nourriture. Alors quoi, un arbre dépressif ? Un arbre qui se laisse mourir, est-ce possible ?

J'en parle à un de mes amis du village, paysan de son état, qui m'indique alors les coordonnées d'un type étrange, vivant à l'écart, dans une cabane sur l'autre versant de la colline.

« Il pourra peut-être t'aider, me dit-il, sans plus de précisions.

Le lendemain, je chausse mes godillots de marche, empoigne un sac avec de l'eau et des vivres pour aller voir cet homme mystérieux.

Je frappe à la porte de la cabane. Pas trop fort. Elle n'a pas l'air très solide. Elle pourrait même figurer dans l'histoire des trois petits cochons. Étonnant qu'elle soit encore debout, avec les tempêtes qu'on se paie parfois dans le secteur.

Pas de réponse. Je reste quelques instants, les bras ballants. Puis une voix retentit derrière moi, une voix grinçante : « Vous cherchez quelqu'un ? »

Oui, je réponds. Je me retourne. Je comprends que c'est lui. Un chapeau à larges bords, un corps sec, un bâton de marche noueux à la main, la peau burinée par la vie au grand air. J'ai l'air d'un citadin à côté.

Je lui raconte mon problème. Il hoche la tête.

« On y va ! Dit-il en entamant le chemin en direction de mon domicile.

Dans mon jardin, au pied du mur, il examine un instant les pierres, puis il grimpe lestement et se laisse tomber de l'autre côté.

« Vous êtes sûr ? Je lui demande, vaguement inquiet.

« Le domaine est abandonné, me répond-il en haussant les épaules.

Rassuré, je le suis. Il s'avance vers l'arbre et se concentre intensément. Puis il touche une de ses rares feuilles, son tronc malingre. Une faible brise se lève. Il bouge ses lèvres comme s'il marmonnait. J e m'approche. Je n'entends rien.

Il s'agenouille sur le sol, arrache les ronces qui enserrent la base du tronc, dégage les racines qu'il humecte avec un peu d'eau de sa gourde en fer blanc.

Finalement, il se relève et dit : « Ça devrait aller ! »

Devant mon air interrogateur, il prononce : « Esprit dépressif. Le traitement est facile. Rien de grave. Parlez-lui tous les jours pour le renforcer. »

Ce fut ma première rencontre avec l'homme qui murmurait à l'oreille des arbres.
Greg.

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