mercredi 28 février 2018

Atelier d'écriture du 11/12/2017

Animé par : Philippe
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Un tire d'article de journal : Inventaire dans le magasin de demain
Proverbe japonais : La haine est une émotion aussi dangereuse que l'amour

La vitrine était immense, éclairée par des milliers de LED de toutes les couleurs. Des ours en peluche se dandinaient en chantant des mélodies mièvres de Noël. Un Santa Klaus en costume écarlate ourlé de blanc franchissait une montagne sur un traîneau tiré par des animaux plus vrais que nature. Des gamins bavaient devant, leurs mains poisseuses de sucre d’orge et de chocolat adhérant à la vitre comme des ventouses, les yeux exorbités, la mâchoire inférieure pendante. Les parents, derrière, dansaient d’un pied sur l’autre pour se réchauffer, impatients de rentrer à la maison, leur respiration matérialisée par un brouillard devant leur visage.
L’enseigne du magasin flottait au-dessus de nous, annonçant « Automates et Intelligence Artificielle – Impression 3D de tous vos cadeaux ». Ils en avaient parlé dans la revue « Inventaire ». L’article parlait d’une troisième révolution industrielle. « Dans le magasin de demain, disait l’auteur, vous pourrez concevoir tous vos objets et les imprimer immédiatement. Sur le Net, vous pourrez trouver les plans de robots à imprimer prêts à l’emploi. Chaque échoppe deviendra une usine, chaque client un concepteur, chaque vendeur un sous-traitant. »
Un hologramme surgit devant moi. Pouf ! Un vendeur portant une chemise blanche et un nœud papillon m’invite à entrer. C’est à ce moment-là que ça a commencé à déconner. L’enseigne s’est éteinte et a laissé apparaître un magnifique panneau bleu portant l’inscription : « Fatal Error – System must be rebooted. »
Certainement encore un coup des info-terroristes russes ! Les nounours gentils dans la vitrine se sont arrêtés, les LED ont clignoté puis se sont éteintes. La rue était dans l’obscurité. Puis soudain, le bruit d’un ordinateur qui redémarre, l’écran d’accueil de Fenêtres 3000 apparaît, avec le portrait d’un type à lunettes qui rit de manière diabolique. Les yeux des nounours se sont rallumés. Ils avaient un drôle d’air, tout d’un coup. Au lieu de chanter des chants de Noël prônant la paix et l’amour, ils se sont mis à répéter tous ensemble : « Kill ! Kill ! ». Les enfants se sont mis à hurler, les parents les ont entraînés dans la rue, les nounours ont fracassé la grande vitrine et se sont déversés sur le trottoir, suivis du Père Noël et de son traîneau. Moi, j’ai regardé ça d’un œil goguenard et pas du tout effrayé. J’ai envoyé balader une bonne dizaine d’oursons à coups de bottes. Mais les rennes de l’obèse en costume rouge ont foncé sur moi. J’ai juste eu le temps de me baisser. Au deuxième passage, j’ai attrapé les bois d’un des animaux et j’ai tiré de toutes mes forces. Le traîneau est retombé dans la vitrine et le Père Noël a fini dans le rayon des drones. Ça a fait des étincelles. Le petit bonhomme s’est quand même relevé, mais il s’est pris les pieds dans une guirlande et est tombé face contre terre. Définitivement, cette fois. Les nounours survivants couraient dans tous les sens en balbutiant « Kill ! Kill ! » de leur petite voix douce.
Je suis rentré chez moi, un peu fatigué. À la télé, un parterre de personnalités commentait l’actualité. Le clone de Jean d’Ormesson déclarait :
« Vous savez, la haine est une émotion aussi dangereuse que l’amour ! »
Greg.

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