Petit blog sans prétention rassemblant quelques textes des écrivants de l'atelier d'écriture du Cercle des Lettres et des Arts et du Remue-Méninges.
mardi 8 novembre 2016
Poèmes de l'été
Faut la rattraper!
Il courait à toute berzingue
Faut la rattraper! Faut la rattraper!
Battre la campagne, dévorer les sous-bois
Le pré à traverser, ranger les artichauts
Fer à repasser les coeurs, faire en sorte qu'elle revienne
Tant et si bien
Qu'il chuchotait son nom par-dessus les montagnes
c'Est fini, elle est partie
Encore plus loin que l'océan. sur une île où il fait toujours
Chaud. Elle avait fui les intempéries.
Charité
Charité est un bien vilain mot, disait l'accroche-coeur
Bien vilain ce repas, contraire du désir et des légères moeurs
Ordonnée bien à plat dans le met "oraison"
Commence par goûter à la folle passion
Par chanter bien en choeur
Soi-même est son poison.
Pierre
Pierre, ce coquin, à l'allure de brigand
Qui colle une vipère au noeud de ces matrones
Roule la fille et la mère et le nid et l'enfant
N'attire que soupirs dans un puits de désirs
Amasse un trésor qu'il étouffe aussitôt
Pas sorti de l'auberge qu'il ruine tout espoir et la
Mousse au matin accrochée au soulier, arrachée sur le champ comme tout amour en lui qui se croit rassuré.
Catherine.
mardi 18 octobre 2016
Atelier d'écriture du 01/08/2016
Animé
par : Laurence
Tirage
d’un ensemble de lettres au hasard
Inventer
à partir de ces lettres le nom d’un personnage ainsi le nom d’un
objet ou de son animal familier.
***
Lettres
tirées au sort : C D E E H I I L N
Ce
matin-là, Heidi Clen sortit de chez elle. Elle était accompagnée
de son Cédihélin.
Ce
jour-là, Heidi Clen vécut l’événement le plus étrange de sa
vie.
Le
poil mauve de l’animal ondoyait sous la légère brise et sa petite
trompe mordorée humait avec avidité l’air environnant. Heidi Clen
tira sur la laisse et le cédihélin émit un petit gloussement
harmonieux avant de lâcher une salve d’urine fluorescente sur les
fleurs carnivores de la voisine. La petite bestiole esquiva in
extremis les mâchoires de la plante qui se refermèrent avec un
claquement sec. Puis elle trottina en direction de la forêt
turquoise en bordure de laquelle s’écoulait la rivière. Heidi
Clen put enfin défaire le mousqueton de la laisse pour laisser le
cédihélin gambader à son aise. Avec sa trompe, il aspira une
grande quantité d’insectes qui constituaient la majeure partie de
son repas. l’autre partie était constituée de biscuits
ultra-vitaminés que vendait l’épicier vénusien du coin de la
rue.
Ce
jour-là, Heidi Clen vécut l’événement le plus étrange de sa
vie.
En
farfouillant dans un buisson, le cédihélin débusqua un être
bizarre, une espèce que tout le monde croyait disparue, engloutie
dans le Grand Cataclysme Climatique. Les tentacules de la jolie Heidi
en frémissent encore aujourd’hui d’horreur et de stupéfaction.
Dérangée
par le cédihélin qui cherchait un essaim ou une fourmilière, la
créature se leva. Elle était très grande, presque deux mètres de
haut, vêtue de peaux d’animaux divers, dont quelques peaux mauves
de cédihélins. Sa peau était rose et, horreur, il avait seulement
deux bras et au bout de ces bras, de tous petits tentacules appelés
doigts (Heidi se souvenait de ses cours de paléontologie à
l’Université de Mars).
La
créature, appelée « humain », pensait se souvenir
Heidi, émit un cri rauque et s’élança de toute la force de ses
appendices musculeux, appelés « jambes », vers le fin
fond des bois, où jamais personne ne s’aventurait.
Heidi,
en tremblant, ramassa son cédihélin, qui s’était réfugié sous
les ventouses de ses tentacules et courut se réfugier dans son
appartement.
Elle
ne raconta jamais cette rencontre du troisième type, tout le monde
l’aurait prise pour une folle, de toute façon.
Greg.
***
lundi 29 août 2016
Atelier d'écriture du 22/08/2016
1) Écrire une carte postale par un personnage célèbre vivant ou mort, réel ou fictif en 8 à 10 lignes. Il est en vacances et écrit à quelqu'un. Les autres doivent pouvoir deviner, en fonction des indices semés ici et là, qui est l'auteur et qui est le destinataire de cette carte postale.
2) Écrire un texte à partir des mots trouvés sans utiliser le mot de la couleur tout en faisant deviner la couleur choisie
***
1) Très cher ami, je pense à vous si loin de moi et si occupé par les missions pour lesquelles vous avez été élu à la tête du pays. Comme à l'accoutumé, avant de m'endormir et en écrivant ces quelques lignes, je suis dans le plus appareil, ne portant bien sûr, sur moi, que mon parfum préféré : Chanel n°5. Je vous envoie ces quelques mèches de cheveux que j'ai coupé pour vous sous ce soleil radieux des tropiques. Le tournage du film se passe bien mais tu me manques terriblement.
Popoupidou
PS : je serai de retour pour ton anniversaire et te chanter Happy Birthday Mister Président.
God Bless America.
Virginie.
2) Je suis partie me mettre au loin dans une cabane perdue au fin fond de la forêt, du jour au lendemain. J'en avais assez de ce système, de cette société de consommation.
Je suis partie m'isoler, loin des voitures, du stress et de la pollution.
Je suis partie pour cultiver mon jardin. C'est la recette du bonheur, n'est-ce pas mon cher Candide ? Ici poussent pêle-mêle haricots, petit-pois, persil et basilic.
Je suis partie vivre autrement, plus simplement, en quête d'une sobriété heureuse. Qu'en dis-tu mon Pierrot ?
Je suis partie sur un coup de sang. Une folie, certains diront ! Fini les bijoux garnis d'or et d'émeraude, fini les grands appartements et les matchs de l'ASSE. Je ne suis plus la politique et j'ai rendu mon badge aux écolos. Je ne ressens plus de colère, ni de rage au milieu des arbres et des prairies fleuries.
Virginie.
***
1) Ma très chère Jo,
J'ai passé un bel hiver à la campagne. Les Autrichiens sont sympa. On a joué à la bataille. Le temps était d'abord au brouillard et puis, quand ça s'est dégagé, je suis allé faire un tour sur le plateau. Il faisait un superbe soleil. Je leur ai mis la pâtée, comme d'habitude. Je me sens un peu fatigué. Dans quelque temps, j'irai peut-être faire une retraite en Russie, en espérant que les Allemands me laissent tranquille.
PS: J'ai déchiré la poche intérieure de mon veston et je suis obligé de retenir mon portefeuille avec la main pour l'empêcher de glisser.
A bientôt,
Ton petit caporal.
2)
Je suis passé au feu tricolore. Ça avait la couleur d'une pierre
précieuse. J'ai foncé. Elle va être en colère, couleur printemps, si
j'arrive en retard. Ça me fait penser à ma plante sur le balcon. Tant
pis. J'ai pas la main chlorophylle, de toute façon. J'arrive. On boit
l'apéro, un vin trop jeune, pour fêter nos années couleur pelouse. Elle
me parle des vacances. Elle a envie de se mettre dans un endroit qui
n'est pas fané, où l'herbe est tendre. Je lui réponds que oui, pour
rester alerte, je veux bien mettre un bermuda couleur camouflage et
m'allonger sur un transat, manger de la salade, marcher pieds nus dans
l'herbe fraîche. Je suis saoul. Je vais m'allonger sur le canapé, la
laissant là, devant la bouteille couleur pastèque, dans un coin, à
l'ombre des feuilles des arbres qui rafraîchit la peau comme le menthe
rafraîchit l'haleine. Je fais une vague sieste. Des rêves gris passent
dans ma tête. Je me réveille vaseux comme un nénuphar. Elle est à côté
de moi. Elle en écrase, la pauvre. J'ose pas me lever pour me passer de
l'eau sur le visage et soigner ma migraine. Putain de vin couleur pomme.
J'ai un poireau qui me pousse dans le crâne, on dirait.
Je
regarde les restes du repas. Les petits pois, tristes dans les
assiettes, me font penser à l'absurdité de la vie, mais aussi à sa
beauté, qui en est le corollaire. La vie est belle. Nous sommes beaux,
parce que nous sommes absurdes, nous sommes là par hasard, pour admirer
l'univers en passant, comme des badauds alléchés par une vitrine.
L'éclat des étoiles doit se refléter dans notre œil pour exister.
Greg.
jeudi 28 juillet 2016
Atelier d'écriture du 04/07/2016 - 18h15
Animé par :
Marie-Hélène
Extrait de « Les
Fleurs Bleues » de Raymond Queneau
« Le
vingt-cinq septembre douze cent soixante-quatre, au petit jour, le
duc d'Auge se pointa sur le sommet du donjon de son château pour y
considérer, un tantinet soit peu, la situation historique. Elle
était plutôt floue »
Imaginer la suite.
***
Le Baron d'Arconay
ne lui avait pas prêté hommage, c'est-à-dire qu'il n'avait pas
renouvelé la promesse de feu son père d'être son vassal et de le
servir à chaque fois que son devoir le lui commanderait. Ce félon
avait en outre promis sa fille au Duc de Lamaury, dont les terres
avoisinaient la baronnie.
Le Duc d'Auge ne
savait donc pas quoi faire. Entrer en guerre contre ce d'Arconay de
malheur pour tenter de mater ce malotru et encourir les foudres du
Duc de Lamaury dont l'armée pouvait fort bien entrer en campagne,
envahir son duché et le mettre à sac ? Sans compter que
Lamaury était bien vu à la cour du Roi de France.
Ou bien laisser
faire les choses, alors que son honneur était en jeu, et risquer de
passer pour un faible aux yeux de ses vassaux qui s'empresseraient
alors d'imiter ce traître et de se mettre sous la protection d'un
autre suzerain.
Son destrier hennit
dans l'écurie. Il descendit prestement du donjon pour prendre
conseil auprès de lui.
« Va falloir
faire un choix, dit l'animal en mâchouillant une gerbe d'avoine.
« Je sais
bien, dit le Duc en soupirant.
Il s'assit sur la
paille, découragé.
« Je t'envie,
toi et ta vie de canasson. Tu n'as pas de dilemmes, tu vas où les
hommes te mènent, reprit-il.
« Tu
m'emmènes à la guerre ou à la chasse, sans me laisser le choix.
Toi, tu as le choix et les responsabilités de prendre des décisions
t'incombent. Chacun ses difficultés, répondit l'animal philosophe.
« Alors, que
me conseilles-tu, ô ami équidé ?
Le cheval engloutit
encore quelques bouchées d'avoine et le silence s'installa,
uniquement troublé par le bruit des molaires écrasant les tiges.
Puis il déglutit
et se tourna vers son maître.
« Il y a une
troisième solution entre la défaite militaire et le déshonneur.
J'ai cru comprendre que ce baron était veuf, comme toi. Propose-lui
une de tes filles en mariage et une partie de tes terres en dot.
« Mes
terres ? Alors je devrais céder des terres et confier une de
mes filles, la prunelle de mes yeux, à ce criminel ?
Si le cheval avait
eu des épaules, il les aurait haussées.
Il plongea son
museau dans le bac et but goulûment.
Puis il releva la
tête et dit d'un ton sentencieux :
« Entre la
mort et le déshonneur, le passage est parfois étroit et tortueux. À
ta guise, mon maître.
Il émit ensuite un
hennissement qui fit trembler les murs de l'écurie.
Le sage avait
parlé. Le Duc se retira et remonta sur le donjon pour considérer la
situation d'un œil neuf.
Un dilemme à trois
issues. Ça se compliquait considérablement.
« Quelle idée
aussi, de demander conseil à un cheval, se dit-il en marmonnant.
Greg.
Atelier d'écriture du 27/06/2016 - 18h15
Animé par :
Carole
Deux thèmes au
choix :
« Étant donné
un mur, que se passe-t-il derrière ? »
« Les maillots
qui grattent »
***
Au
pied du mur en pierre entourant le domaine jouxtant mon modeste
jardin, se trouve un petit arbre faiblard sur les branches duquel
poussent deux ou trois feuilles maladives. Je le regarde parfois,
juché sur un seau retourné, par-dessus le mur en caillasse grise.
Il me fait de la peine. Personne ne vient l'arroser, le soigner, le
dégager des ronces qui l'enserrent. Pourtant, la maison du
propriétaire est presque entièrement dissimulée par d'immenses
chênes aux troncs massifs et vigoureux.
Pourquoi
cet arbre, à part des autres, souffre-t-il autant, pourquoi ne
pousse-t-il pas et ne ressemble-t-il pas à ses congénères avec
lesquels il partage pourtant la même terre. De temps à autre,
n'écoutant que ma compassion, je tente de l'arroser. Par-dessus le
mur, je lui lance un peu de compost pour le fortifier. Mais il ne
grandit pas, comme s'il dédaignait toute nourriture. Alors quoi, un
arbre dépressif ? Un arbre qui se laisse mourir, est-ce
possible ?
J'en
parle à un de mes amis du village, paysan de son état, qui
m'indique alors les coordonnées d'un type étrange, vivant à
l'écart, dans une cabane sur l'autre versant de la colline.
« Il
pourra peut-être t'aider, me dit-il, sans plus de précisions.
Le
lendemain, je chausse mes godillots de marche, empoigne un sac avec
de l'eau et des vivres pour aller voir cet homme mystérieux.
Je
frappe à la porte de la cabane. Pas trop fort. Elle n'a pas l'air
très solide. Elle pourrait même figurer dans l'histoire des trois
petits cochons. Étonnant qu'elle soit encore debout, avec les
tempêtes qu'on se paie parfois dans le secteur.
Pas
de réponse. Je reste quelques instants, les bras ballants. Puis une
voix retentit derrière moi, une voix grinçante : « Vous
cherchez quelqu'un ? »
Oui,
je réponds. Je me retourne. Je comprends que c'est lui. Un chapeau à
larges bords, un corps sec, un bâton de marche noueux à la main, la
peau burinée par la vie au grand air. J'ai l'air d'un citadin à
côté.
Je
lui raconte mon problème. Il hoche la tête.
« On
y va ! Dit-il en entamant le chemin en direction de mon
domicile.
Dans
mon jardin, au pied du mur, il examine un instant les pierres, puis
il grimpe lestement et se laisse tomber de l'autre côté.
« Vous
êtes sûr ? Je lui demande, vaguement inquiet.
« Le
domaine est abandonné, me répond-il en haussant les épaules.
Rassuré,
je le suis. Il s'avance vers l'arbre et se concentre intensément.
Puis il touche une de ses rares feuilles, son tronc malingre. Une
faible brise se lève. Il bouge ses lèvres comme s'il marmonnait. J
e m'approche. Je n'entends rien.
Il
s'agenouille sur le sol, arrache les ronces qui enserrent la base du
tronc, dégage les racines qu'il humecte avec un peu d'eau de sa
gourde en fer blanc.
Finalement,
il se relève et dit : « Ça devrait aller ! »
Devant
mon air interrogateur, il prononce : « Esprit dépressif.
Le traitement est facile. Rien de grave. Parlez-lui tous les jours
pour le renforcer. »
Ce
fut ma première rencontre avec l'homme qui murmurait à l'oreille
des arbres.
Greg.
dimanche 19 juin 2016
Atelier d'écriture du 13/06/2016 - 18h15
Animé par : Sarah
Première
phrase complète prise page 99 du roman « Laura C. » de
J. Duquesne :
« Les
policiers écoutaient à peine, un peu embarrassés quand même ».
Consigne :
intégrer cette phrase dans un texte, mais ni comme incipit, ni comme
conclusion.
***
« Au
marché de Brive la Gaillarde
À
propos de bottes d'oignons
Quelques
douzaines de gaillardes
Se
crêpaient un jour le chignon
A
pied, à cheval, en voiture
Les
gendarmes mal inspirés
Vinrent
pour tenter l'aventure
D'interrompre
l'échauffourée
Or,
sous tous les cieux, sans vergogne
C'est
un usage bien établi
Dès
qu'il s'agit d'rosser les cognes
Tout
l'monde se réconcilie
Ces
furies perdant tout'mesure
Se
ruèrent sur les guignols
Et
donnèrent, je vous l'assure
Un
spectacle assez croquignol »
Là
cesse mon emprunt à Georges
L'récit
maintenant est de moi
Ça
crie comm' cochon qu'on égorge :
« Des
renforts ! Des renforts ! Holà ! »
Le
maire appelle la préfète
Qui
aussitôt relaye l'SOS
« Envoyez
vite une estafette !
Oui
ça urg', je dis mêm' ça presse ! »
V'la
donc les renforts qui rappliquent
On
tent' un point d'situation
On
va expliquer à ces flics
La
genèse de cette baston
Les
policiers écoutaient à peine
ça
les gavait bien d'être là
Un
peu embarrassés quand même
Mais
leur chef a dit : « On y va ! »
Alors
ils fonc'nt dans la mêlée
Ils
sortent leur canon à eau
Hésit'nt :
« Est-ce qu'on va taser
Ou
s'borner à des lacrymos ? »
Soudain
les femelles en rage
Cessent
de cogner les guignols :
Ell's
doiv'nt rentrer fair' leur ménage
Et
chercher les mômes à l'école
Que
reste-t-il de cett' bagarre
Un
peu r'vue, un peu corrigée
Quelques
brib's dans quelques mémoires
Quelques
trous place du marché
Brive
la Gaillard', si charmante
A
repris son gentil train-train
Une
histoir' de gnons et de pains !
Mais
parfois, c'est vrai, on y chant'
Et
pour ceux qui voudraient revenir au texte original de la chanson du
grand GeorgesBrassens, le titre en est « Hécatombe »
Laurence.
***
Jeudi soir, au
sortir de l'AMAP, alléché par la perspective d'une bonne salade
verte et de pommes de terre rissolées, je marchais d'un bon pas,
perdu dans mes pensées culinaires. Mon sac Lidl se balançait
doucement au rythme de mes pas. Le nez en l'air, admirant les
étoiles, je ne m'étais pas aperçu que je m'étais éloigné de la
ville, doucement bercé par la fraîcheur du soir. Je me suis
retrouvé sur un chemin de terre et, après quelques instants
d'égarement, je me suis à nouveau mis en marche vers ce que je
supposais être la direction de mon logis. J'arrivai à une petite
route et il ne restait plus qu'environ deux kilomètres à parcourir
lorsque, derrière moi, résonna une petite voix.
« Schluf
Zorbizof Euro 2016 ?
Une fois mes yeux
habitués à l'obscurité, je vis une petite silhouette, un peu
malingre, surmontée d'une tête grosse comme une pastèque dont les
yeux noirs me dévisageaient d'un air interrogateur. Je ne savais pas
quoi répondre. Peut-être était-ce simplement un supporter tchèque
qui s'était égaré dans la campagne et cherchait le stade Geoffroy
Guichard. Alors, je me suis lancé dans des explications complexes et
embrouillées pour lui indiquer le chemin. Ça n'a pas été très
probant. Le type a ensuite tourné les talons après avoir baragouiné
un truc comme « Xeroflu Bleuren Guichard ».
J'ai haussé les
épaules et j'ai repris mon chemin sans me poser de questions et
c'est là que je l'ai vu. Derrière les arbres, ça a fait comme une
lueur bleuté, un long sifflement aigu et de la fumée blanche. Ça
volait lentement au début, c'était comme deux sous-tasses collées
l'une à l'autre, vous voyez ? Ou plutôt un gros macaron noir
avec des voyants qui clignotaient de partout, comme dans ce film des
années quatre-vingt, vous savez ?
Les flics écoutaient
à peine, un peu embarrassés quand même. Y en a un qui regardait
son café, un autre se grattait la tête, le troisième tapait sans
conviction sur le clavier de son ordi.
Ils m'ont fait un
alcootest et j'ai repris mon sac. J'en ai vu un qui rigolait dans le
couloir. Ça ne m'a même pas vexé. Je suis resté digne, avec mes
légumes bio et ma conscience tranquille. Ils en feront une drôle de
tête quand, à la place d'un match de l'Euro 2016, ils verront un
vaisseau de l'espace se poser sur la pelouse du terrain.
« Bogdanof
Schogli », m'a fait un petit être sur le trottoir avec un
signe de sa main à trois doigts.
« Bienvenue
sur Terre », je lui ai répondu.
Une invasion, c'est
pas franchement ce qui peut nous arriver de pire, au point où on en
est !
Greg.
dimanche 5 juin 2016
Atelier d'écriture du 23/05/2016 - 18h15
Animé
par : Greg, sur la base d'idées de Laurence.
Soutien
au Remue-Méninges
Quel
est votre plus beau souvenir au Remue-Méninges ?
Et
si le Remue-Méninges n'existait plus ?
« Je
me souviens de ma première fois au Remue-Méninges »
Écrire
une chanson sur un air connu qui explique ce qu'est le
Remue-Méninges.
Raconter
ou inventer une anecdote ayant pour cadre le Remue-Méninges
***
On
prend l’habitude…
Raser
le coin de la rue Émile Reymond
Prendre
à gauche rue Désiré Claude (qui, en vrai, s’appelait Claude
Désiré)
Apercevoir
à quelques mètres, sur le trottoir, le panneau surmonté d’une
marque de blonde tchèque
Vérifier
le programme du jour, histoire de ne pas s’agréger par mégarde à
une distribution de légumes avec un stylo pour tout potage…
Normalement
on est lundi, le lundi c’est écriture.
Et
là… RIEN !!
Plus
de panneau
Pas
une chaise en terrasse
Plus
de devanture rouge
Zéro
vitrine.
C’est
un cauchemar.
La
rue est, comme d’habitude, fréquentée par des bagnoles.
Mais
sur le trottoir on peut voir errer, désemparés, comme autant de
points d’interrogation :
-
Un couple de danseurs de tango (en costume, escarpins cirés),
-
Plusieurs individus, le cahier sous le bras,
-
Un grand monsieur qui porte un estofa-fuòc rouge, prêt à servir, de marque CSP
-
Un barman sans plateau, deux plateaux (d’échecs) sans joueurs
-
Des piles de livres sans lecteurs
-
Des lecteurs sans leur verre
-
Des gens qui jouent dans une pièce de vampires et se lancent des répliques de la pièce « Grand fou ! – Non, je ne suis pas fou », etc.
-
Amnesty International en train de préparer tout de même leur prochaine soirée d’info…
Et
puis, et puis…
Des
livres des livres des livres, des gens. Un frigo vide, béant. Un
piano avec toutes ses dents, mais muet. Un percolateur, dix
bouteilles de sirop dont certains aux parfums très étranges. Des
tabourets, un fauteuil rouge, des pages et des pages d’écriture
évadées d’un gros classeur : prose, poésie, contes… Une
farandole de chaises, d’affiches, des tableaux, deux ou trois
dessins rigolos…
Et
pas le moindre raton-laveur.
Sur
le trottoir opposé : trois canapés vides alignés.
Je
m’assois donc et contemple en face de moi la bâche aux couleurs
criardes avec son slogan racoleur, qui recouvre l’emplacement de
notre café associatif préféré :
« LOCAL
A RECONVERTIR EN COMMERCE PAYANT.
ICI
LA VILLE DE SAINT-ÉTIENNE BÂTIT VOTRE AVENIR ».
Tu
parles…
Marie-Hélène.
***
"Je
me souviens de ma première fois au Remue Méninges"
Ma
première soirée au Remue Méninges... j'ignorais alors qu'elle
allait constituer le début d'une longue, longue série d'autres
premières.
Installée
à Saint-Étienne depuis quelques semaines, j'avais abordé l'une de
mes nouvelles collègues avec laquelle il paraissait que j'avais
quelques atomes crochus. D'ailleurs, c'était elle qui avait commencé
en me disant "J'aime bien ton côté baba cool, tu dois manger
bio, non ?". Sans blague, ça se voit tant que çà ?!!
Je
l'avais abordée, donc, pour lui demander si elle connaissait un lieu
où je pourrais avoir des légumes bio, locaux... "une AMAP quoi
!", avais-je précisé, "je faisais çà à Lille où
j'habitais avant, et je trouvais que c'était à la fois sympa et
très bon !"
-
Tu fais quoi jeudi soir ? Me répondit-elle
-
Ben, rien... je connais encore personne ici... à part les collègues
du service
-
Bon, alors je t'emmène boire un coup au Remue Méninges, c'est là
que je prends mon panier AMAP depuis 2 ans. L'endroit devrait te
plaire, ajouta-t-elle avec un petit sourire...
Et
me voici de retour chez moi, l'adresse du Remue Méninges bien notée
sur un post-it emprunté au service. Voyons, mon plan de Sainté (ah
oui, en quelques semaines j'ai déjà appris qu'on pouvait dire
"Sainté"), repérage de l'itinéraire entre chez moi et le
59 de la rue Désiré Claude. OK, je suis parée, et je retrouve ma
collègue devant le Remue Méninges. (A noter que, pour ma première
fois, je n'ai pas galéré pour stationner ! Depuis... c'est souvent
une autre histoire !).
Bon,
ben m'y voici dans cet endroit qui "va sûrement me plaire".
-
Salut Christine, tu vas ?
5
ou 6 personnes se sont approchées de ma collègue...
-
Je te présente Laurence
Et
clac, direct, 5 ou 6 bises claquent sur mes joues
-
Tu bois quelque chose ?
-
Moi, c'est Jean-Louis
-
Salut, moi c'est Ben
-
Sois la bienvenue !
Et
puis voilà Didier et ses paniers de légumes...
C'est
sur, la première impression est plus qu'encourageante... elle frôle
même l'enthousiasme !
-
Tiens, prends un programme ! Me glisse Justine, ou Audrey, je ne sais
plus
C'était
donc un jeudi.
La
semaine suivante, j'étais à l'atelier d'écriture le lundi, puis le
jeudi à l'AMAP, puis le vendredi à un concert.
Et
puis après, les autres semaines suivantes, juste pour retrouver,
toujours intacte depuis bientôt 2 ans, la chaleur du lieu, les
échanges, les copines et les copains (çà change des collègues,
même s'ils sont cools), une, deux, trois fois par semaine, parfois
plus..
Et
puis même les week-ends lorsqu'il y a des choses prévues, le
festival Paroles et Musiques, les Guinguettes, et puis aussi le
bénévolat au bar, et l'engagement au CA...
Allez,
j'avoue : si j'ai eu envie de me poser à Saint-Étienne, si je fais
tout pour pouvoir y rester, ma première fois au Remue y est pour
quelque chose !
Et
ma collègue ? Elle va bien, et je la remercie encore de m'avoir
amenée jusqu'ici !
Laurence.
***
Je
me souviens...
Du
Remue-Méninges comme d'un lieu avec des fauteuils, des tables
basses, des chaises dépareillées, une toile cirée à pois sur une
petite table carrée. Sur une minuscule estrade rouge dans le fond,
était installé un groupe de musiciens aux accents latinos ou
autres. Au comptoir, on buvait de la bière locale en devisant sur
l'état du monde ou sur les petites misères du quotidien.
Près
de la grande fenêtre donnant sur la rue, une étagère remplie de BD,
à côté d'un canapé usé mais semblant encore confortable. En
face, des livres rangés sur des rayonnages noirs. Sur une petite
bibliothèque, des ouvrages de poésie en dépôt-vente.
Je
n'avais pas encore saisi la signification du terme « participatif »,
mais j'avais déjà classé le lieu dans la catégorie « insolite ».
Après
le concert, des personnes du public sont montés sur la scène pour
un « bœuf » à la guitare et aux percussions,
quelques-uns ont entonné une chanson. L'ambiance était au max,
l'atmosphère chaleureuse et simple, pleine de vie.
C'est
bien après, vers la fin de la soirée que je l'ai aperçu, du coin
de l’œil. Au début, il n'avait pas attiré mon attention, noyé
qu'il était dans la multitude d'autres comme lui.
Un
petit flyer dont la couleur n'est pas restée dans mon souvenir. Je
l'ai pris dans la main et il m'a dit, d'un ton sympathique :
« Atelier
d'écriture, les deuxième et quatrième lundis du mois au
Remue-Méninges »
C'était
quelque chose que je recherchais depuis toujours et ce lieu me
tendait les bras, me déclarant :
« Hé,
ça peut t'intéresser ! »
Un
lieu rare, fragile comme toutes les choses rares, comme toutes les
espèces en voie de disparition, où on peut lire, écrire, parler,
écouter, entendre, regarder, voir, participer, prendre la parole,
organiser, chercher, trouver, réfléchir, donner et prendre des
idées, emprunter et échanger des livres, gérer, prendre des
responsabilités ou tout simplement boire des verres, s'en faire
offrir, en payer, même passer derrière le comptoir pour en servir.
Bref, un monde en soi, un univers, mais un univers ouvert vers
l'extérieur, l'autre.
Les
différences déséquilibrent et font tourner la grande roue de notre
planète, elles bousculent, elles sont in-maîtrisables,
irréductibles, effrayantes parfois, mais elles constituent le
combustible de notre monde, le seul qui soit inépuisable et
renouvelable.
Le
Remue-Méninges porte en lui tout cela, il porte une dynamique qui ne
s'effondre pas si on le laisse vivre.
Cette
leçon vaut bien une subvention, sans doute ?
Greg.
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