Inducteur :
deux nouvelles dont il faut imaginer la suite
***
La
chasse au Georges
Irène
m’avait plu au premier regard. Ses cheveux ondulés et roux me
plaisaient, tout comme son sourire, ses yeux plissés lorsqu’elle
riait ou se protégeait du soleil. Sa façon de détourner timidement
la tête et de toucher ses sourcils lorsqu’une situation
l’embarrassait. Nous étions allongés sur des chaises longues,
dans le jardin de sa villa, à deux pas du grand rosier, juste
derrière la piscine qui promenait ses reflets sous les rayons
ardents de midi. L’ombre des chênes nous reposait du repas. Je fus
pris de somnolence sur la chaise longue. Irène dormait déjà, une
mèche de cheveux sur sa joue constellée de taches de rousseur, la
bouche entrouverte. Quelques oiseaux pépiaient dans les branches. Je
ne sais pas combien de temps j’ai dormi. Je fus réveillé par
Irène qui me secouait l’épaule.
« Georges
n’est plus là ! Dit-elle
Elle
peinait à trouver son souffle. L’angoisse avait emmêlé sa
chevelure enflammée par les dernières lueurs de l’après-midi,
son regard balayait les troncs noueux. Un regard anxieux. Sa
respiration reprit enfin, haletante.
« Je
suis monté au premier étage pour voir s’il allait bien. Il n’y
est pas…
Je
réprime un bâillement.
« Il
a dû aller faire un tour. Il avait besoin de se dégourdir les
jambes. C’est bon pour personne, l’inactivité.
-
Pas tout seul, répondit-elle, il ne se promène jamais sans moi, je
le lui ai interdit !
-
Interdit ?
Quel
curieux couple ils font ! Un couple fusionnel. Jamais l’un
sans l’autre. Je suis content tout d’un coup d’être seulement
son ami. Une relation aussi étouffante, non merci !
Nous
partons à la recherche de Georges. Sur les sentiers du parc, dans la
rotonde, dans la roseraie, dans les différents bâtiments de la
propriété, même chez le voisin.
« Georges !
Georges ! Mon Dieu, il va se perdre !
Se
perdre ? Le parc est grand, mais quand même !
Irène
est comme folle. Elle fouille les buissons, scrute l’horizon,
appelle toutes les cinq secondes.
« Bougez-vous,
enfin ! Il faut le retrouver !
Sa
voix devient stridente. Hystérique. Elle entame une course effrénée
sur la pelouse, près des massifs de fleurs mauves et blanches.
Soudain :
« Oh !
Georges ! Où étais-tu ? Je t’avais pourtant dit de ne
pas t’éloigner ! Mon petit chéri ! Viens voir ici,
viens …
Elle
revient vers moi, radieuse, me tend une boule de poils et me dit :
« Bernard,
je vous présente Georges. Georges, dis bonjour à Bernard !
Georges
me passe sa langue sur le nez et émet un aboiement aigu.
Greg.
***
Les jours suivants notre
rencontre au parc furent de plus en plus beaux et enthousiasmants. A
chacun de nos rendez-vous je me demandais quels seraient nos sujets
de conversation, combien de temps s’écoulerait avant qu’Irène
ne me parle de Georges.
Tout est toujours en retenu
entre nous, comme suspendu. Oui je suis suspendu à ses lèvres. Je
goûte, je savoure, je me délecte de ses paroles, de chacun de ses
mots, de chacune de ses intonations, de chacun de ses gestes. Tout
chez elle m’enchante. Jour après jour, de conversation en
conversation, j’ai cette douce impression, sensation peut-être
intuition ou désir fou, que nous nous comprenons, que nous nous
rapprochons l’un de l’autre. Au fur et à mesure qu’elle se
rapproche de moi, elle s’éloigne un peu de Georges. Chacun de ses
sourires m’enivre. Chaque regard complice échangé me fait
frissonner.
Je suis passé, au fil du temps,
du statut d’ami à celui de confident (et peut-être bientôt celui
d’amant !). ô ma douce, tu peux venir me narrer toutes tes
histoires autant qu’il te plaira. Un simple geste vers moi de ta
part me remplit de joie. Tous tes tracas deviennent les miens. Toutes
tes hésitations, respirations font désormais partie de mon
quotidien. Tu m’accompagnes (tu es ma compagne). Tu es avec moi à
chaque instant. Tu ne me parles quasiment plus de Georges. A-t-il
disparu ? Est-il parti ? Commences-tu à l’oublier ?
Serai-je devenu l’homme qui pourrait te combler ? Rien ne
pourrait me faire plus plaisir.
ô ma chère et tendre Irène,
je me languis de vous revoir…
Pourquoi être partie, si vite,
l’autre soir, sans mot dire. J’ai bien vu ces larmes perlant au
coin de vos yeux de biche. Ne me laissez plus sans nouvelle de vous.
Je deviens fou !
Virginie.
***
Superbe texte!!!
RépondreSupprimerC.