Animé
par : Virginie
Inducteurs :
divers proverbes africains.
***
Le
bœuf ne se vante pas de sa force devant l'éléphant.
C'est
ce que ma mère m'a dit quand je lui ai raconté ma dernière
aventure. Enfin, je devrais plutôt dire, mésaventure.
Tout
d'abord, laissez-moi me présenter. Je me prénomme Alexandre.
Alexandre Poutkine. Ma mère est française, mais mon père est
d'origine russe. Le bœuf ne se vante pas de sa force devant
l'éléphant. Je suis guide. Guide dans un musée. J'ai quelques
connaissances. Je les cultive par des lectures assidues. Quand on est
guide, il faut beaucoup se documenter.
Le
conservateur du musée est un homme sûr de lui. De vagues origines
italiennes lui donnent une assurance que j'ai toujours enviée. Cela
fait quatre ans que je bosse ici. Cela fait quatre ans que je me le
farcis. Quatre ans à subir les humiliations, les dénigrements, les
"Retournez en Russie, Poutkine", "Da, moi vouloir
vodka, toi en vouloir ?" Là-dessus, un rire gras.
Toujours, un rire gras.
Ce
qui est très dur, c'est de ressortir de ce lieu plus lessivé que si
j'étais passé tout entier dans une machine à laver. Je ne sens
plus mes forces. Je me dégoûte. La vie est sale et je perds les
couleurs pour la recolorer.
"Tu
as vieilli" m'a dit l'autre soir mon père inquiet en partageant
un verre avec moi.
J'ai
ravalé ma fierté. Je suis un garçon secret. J'ai vaguement souri.
Alors,
quand le conservateur du musée, Tortellini di Pasta comme je
l'appelle, m'a alpagué hier, dans le bureau des guides, j'ai rougi.
-Petit
test, Poutine le russe. Est-ce que tu connais bien tes classiques ?
-Mes
classiques ?
-Oui.
Connais-tu bien la littérature russe ?
J'ai
bombé le torse devant Lasagne di Pasta.
-Mieux
que vous ne croyez, monsieur. Je connais non seulement toute la
littérature russe, mais aussi le russe que je parle couramment, la
culture russe, les peintres russes. Je suis incollable.
-L'idiot!
qu'il me dit.
-"L'idiot"?
Dites donc, faites attention à votre langage, vous !
-Non,
"L'idiot", question on ne peut plus simple, c'est de qui ?
-Archi
facile.
Je
respire avec bonheur. La littérature russe je la connais sur le bout
des doigts. Ce livre, il me semble bien qu'il est dans ma table de
nuit, c'est vous dire. Je pourrais même retrouver, de tête, comme
ça, la couleur de la couverture. Attends, verte ? Avec un peu
de prune. Les lettres d'imprimerie en bordeaux. Enfin, toujours
est-il que c'est Dostoïevski qui l'a écrit, j'en mettrais ma main à
couper. je vois la belle lettre du "D" se détacher. Elle
imprègne toute ma cervelle. Un beau grand "D" majuscule,
écriture bordeaux. La grande barre verticale, le trait en haut.
L'autre
croit me dominer. Il m'examine l'air narquois. C'est qu'il conserve
son assurance, le con.
-C'est
c'est ... (pourquoi je bégaye ?) c'est Dosto... Non.
Je
reste un temps en suspens. Je croise son regard noir d'italien
gominé. Son sourire s'élargit. Je fais fausse route, c'est sûr. Je
relâche le ventre.
-C'est
Tolstoï.
Il
éclate de rire, un rire qui part dans les aigus, un rire qui me
glace le sang. Je suis figé sur place.
-Oh,
l'autre, oh le russe! Tu sais pas la dernière?
Il
se tourne vers Sonia, la belle guide que nous convoitons tous. Il se
moque de moi devant elle.
-Retourne
dans ton pays, le russe! Il faudra que je vérifie si tu fais
suffisamment bien ton travail Ça fait peur...
Le
soir, je me ronge le sang, dans mon lit. Oui. Je précise, j'habite
toujours chez mes parents.
Ma
mère éteint la lumière. Je lui ai déjà tout raconté de ma
journée mais rien ne peut contenir ma souffrance.
Elle
susurre près de mon oreille. Je ne l'ai pas entendu s'approcher:
-L'erreur
n'annule pas la valeur de l'effort accompli.
Je
souris dans mon sommeil. Cette femme a le chic avec ses foutus
proverbes pour vous insuffler des leçons de vie.
Je
rallume. J'ouvre "L'idiot" de Dostoïevski.
Catherine.
***
Proverbe :
Le temps est une lime qui travaille sans bruit
La
pierre devient sable
Et
le sable poussière
La
poussière s'envole,
Disparaît
dans l'Ether.
La
montagne s'affaisse
Et
les monts s'aplanissent,
Et
l'île disparaît
Entre
les flots glacés...
La
glace devient eau
Et
l'eau devient vapeur,
La
vapeur disparaît
Et
reste alors le rêve.
Le
rêve devient feuille,
La
feuille tombe à terre
Et
terre elle devient
Et
disparaît bientôt
En
atomes épars,
Mais
l'homme voyant ça,
Toujours
voulant savoir
Quand
doit être la fin,
A
inventé le temps !
Et
le temps dans tout ça ?
Le
temps est une lime
Qui
travaille sans bruit...
Jean-François
***
« Quand
on a un marteau dans la tête, on voit tous les problèmes sous la
forme d'un clou. »
C'est
possible, moi je n'en sais rien. En tout cas, on m'a toujours répété
que j'étais « marteau », alors si tous les problèmes
ont la forme d'un clou, je devrais être en mesure d'en régler la
plupart en tapant dessus. Je me suis donc mis à la recherche de
problèmes à tête plate, pas trop durs à résoudre.
La
porte du grenier était là, qui me regardait du haut de l'escalier.
Depuis que j'avais hérité de la maison, je ne l'avais jamais
ouverte. Qu'y avait-il derrière ? Mystère. Un mystère est une
forme d'énigme, non ? Et une énigme ressemble à un problème
à résoudre. Avec mon marteau dans la tête, j'ai donc grimpé une à
une les marches grinçantes qui menaient à la mystérieuse gardienne
des secrets enfouis de notre famille. J'étais le simple d'esprit de
la famille, le laissé pour compte et c'était moi, le dernier
survivant de la fratrie, qui allait découvrir tout ce que nos aïeux
nous avaient caché. Quelles sombres vérités se dissimulaient-elles
sous ces combles ?
Les
marches en bois vermoulu grinçaient de plus en plus plaintivement,
donnant à cet instant une aura de menace, comme si nos ancêtres
s'éveillaient et s'inquiétaient à la perspective de me voir
pousser cette porte … qui s'avéra être constituée de chêne
massif et solidement verrouillée par un cadenas en laiton. Mon
marteau n'allait m'être d'aucune utilité. Après une heure de
fouille minutieuse, je trouvai une énorme cisaille. Ça fera
l'affaire, me suis-je dit dans ma pauvre caboche de faible d'esprit.
Et ça a fait l'affaire. Le cadenas s'est coupé net avec un grand
« clac ! » et est tombé sur les marches. J'ai
actionné le loquet. Aucun bruit, pas un grincement, pas un
frottement, comme si la porte avait été posée la veille.
Qu'allais-je découvrir ? Des certificats de naissance sous X,
des insignes nazis, des photos compromettantes, des armes ou tout
simplement de vieilles malles en osier remplies d'antiques frusques ?
Tout sera révélé dans un instant, mais pas tout de suite car 19h30
viennent de sonner et il me faut refermer cette porte énigmatique.
Un problème à la fois, voulez-vous ? J'ai réussi à l'ouvrir,
c'est déjà pas si mal, non ?
Greg.
***
Vous
connaissez l'émission "silence ça pousse" ?
Mais si, vous savez cette émission sur le jardinage. Oui, c'est vrai
qu'il y en a plusieurs du genre. Bon peut-être pas autant que les
émissions sur la cuisine. Bref, je ne vous parle pas de celle avec
Nicolas Le Jardinier mais celle avec cet animateur gai qui parle aux
végétaux comme s'ils étaient ses enfants, qui les caresse, les
cajole, qui leur dit des mots doux, des mots d'amour, des mots de
tous les jours. Il chantonne en grattant la terre et nous donne moult
conseils pour obtenir un jardin, une terrasse ou un balcon luxuriant
en fonction de nos envies et des saisons. Cet animateur-là,
donc, pourrait être l'auteur de ce proverbe Touareg :
"On entend le fracas des arbres qui tombent mais pas le murmure
de la forêt qui pousse". Je me demandais, enfant, et si un
arbre s'effondre au milieu de la forêt amazonienne mais qu'il n'y a
personne aux alentours :
cet arbre fait-il du bruit en tombant ?
Ou faut-il qu'il y ait quelqu'un pour entendre ?
Comment se fait la propagation du son. Et si seul un animal est
spectateur de cette chute comment peut-il rapporter à qui que soit
ce qu'il a vu ou entendu ?
Le bruit n'existe-t-il qu'à partir du moment où quelqu'un est là
pour entendre ?
et pour en parler par la suite ?
C'est vrai, certains animaux sont dotés d'une ouïe très fine,
mais de là à pouvoir
communiquer avec les humains pour leur décrire ce qu'ils ont vu ou
entendu c'est une autre paire de manches. Il n'y a bien que dans la
série télévisée Lassie où ses maîtres comprenaient nombres
d'informations dans quelques aboiements avec ce genre de dialogue :
"Wouf wouf wouf" "Quoi Lassie, Robert a été pris
dans une avalanche sur la face nord de la montagne et il a une jambe
cassée c'est pourquoi il ne peut plus bouger! Vite allons lui porter
secours!" Bref, moi, dans m vie, mon chat fait miaou et je lui
invente des intentions de paroles. Quant à mes plantes et aromates,
jusqu'à présent, j'ai beau tendre l'oreille, je n'ai encore rien
entendu. Mais j'ai peut-être des plantes muettes qui sait !
Notion
et expression avec le mot "porte" :
Ma
porte sera toujours ouverte
Faire
du porte à porte
Prenez
la porte = sortez !
porte-fenêtre
porte-clefs
porte-monnaie
porte
manteaux
Pas-de-porte
à vendre
Se
prendre une porte
Journées
portes ouvertes
Trouver
porte close
Mettre
la clef sous la porte
Virginie.
***
« Là
où le cœur est, les pieds n'hésitent pas à y aller ». Togo.
Mon
cœur recherche la pureté, la vérité, le bonheur. Pureté de l'eau
dont il S'abreuve.
Vérité,
même celle qui n'est pas bonne à entendre.
Car,
sait-on jamais, j'irais même jusqu'à dire, à coup sûr, on peut
trouver un terrain d'entente. L'élu de mon cœur habite loin, loin,
loin.
Pourtant
son cœur est relié au mien.
Son
cœur me rejoint grâce à ses pieds et mon cœur le rejoint grâce à
mes pieds.
Sans
hésitation.
Des
fois, on se croise, on se loupe de peu.
Aucune
autre solution que le destin, nos deux cœurs qui s'appellent, sorte
de télépathie.
Nelly.
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